Anne Itzykson vers une nouvelle gravité
Animées d’une fascinante sensibilité de la gaité et de la tendresse, ses figures poétiques s’inscrivent dans l’intimité, faisant du corps un espace de recherche. Toujours en quête de mouvement et d’expressivité, les sculptures surgissent avec panache pour se propulser vers une nouvelle dimension sociale.
Tout est permis pour célébrer la joie, la félicité de l’enfance et de la féminité. Absorbé dans la contemplation de cette sincère plénitude, nous découvrons une palette complexe d’émotions. Car au-delà de l’instant figé, chaque sculpture accède à une présence, une âme qui dévoile les indices d’un caractère. Anne nous immisce dans une quatrième dimension où les sculptures résonnent, nous parlent. Nous discernons le « Fou rire » de quatre femmes assises sur un banc et devinons les mots que le « Petit Malin » ne veut pas entendre en se bouchant le oreilles en riant. Autant de situations vivantes, subtilement vibrantes qui donnent aux figures l’impression d’exister et même de s’exprimer.
Dans un autre langage, l’artiste décline des paires de jambes et de pieds de nouveau-nés, une thématique désormais récurrente à la recherche d’expressions sans visage. L’étendue de son geste prolifique rassemble une multitude de sculptures de toutes tailles ; des miniatures, des pièces à plus grande échelle pouvant atteindre le monumental. Un véritable répertoire de formes où l’ordonnancement des gestes fait sens dans un espace de dialogue inattendu. Agencés ensemble, les jeux de jambes semblent se chahuter, se répondre, s'inspirer.
En recherche constante d’un moyen de renouveau, l’artiste se consacre plus récemment à des sujets de société. Elle expose en ce sens des pièces en bronze représentent l’engrenage de la vie. Un homme part pressé au travail à vive allure son enfant dans la poussette. Entrainé dans une course effrénée, il écrase le fil de la vie qui se noue, porté en équilibre par une roue gigantesque en résine colorée. C’est le rouage d’une horloge, l’engrenage du temps qui défile. Anne inclut toujours le mouvement dans ses sculptures mais avec cette série, la trajectoire des corps s’amplifie.
Dans le même esprit, « La toile » évoque l’ouverture de l’information et l’attirance magnétique des plus jeunes vers les écrans. Des enfants sont hypnotisés par une toile d’araignée dont l’épicentre est symbolisé par un arobase.
Ces nouveaux paysages narratifs offrent un regard sur l’état d’une situation contemporaine avec un petit décalage entre les attitudes qui se déploient et ce qu’elles nous racontent. Elles ont toutes une histoire et chacune d’entre elles renferme quelque chose, une anecdote, une expression inédite, un secret que le l’on décrypte aux confins de l’intime. Ce glissement entre forme et sens invite à l’interprétation du spectateur et vise son sourire. Les figures toujours délicates nous plongent dans un univers où l’équilibre physique devient polysémique.
De l’œuvre académique à la création moins normative, l’artiste ne délaisse pas son procédé technique parfaitement maîtrisé et sa matière de prédilection ; la terre.
« La terre est un outil de création pure tellement proche de la chair humaine » explique l’artiste.
Anne travaille des matières multiples ; le bronze, le marbre et dernièrement en résine plexiglas teinté dans la masse pour évoluer vers la couleur et la transparence. Elle fait également dialoguer les matières en combinant le bronze avec le verre soufflé par les grands maîtres verriers de Murano.
La série Youpi met en scène une petite fille en bronze bondissant sur un gros ballon de gymnastique en verre soufflé. Entre force et fragilité, sous une tension atypique, les deux matières s’imbriquent avec une improbable ingéniosité, comme les deux faces d’une même réalité. Ces sculptures coercitives se déploient comme autant de formes vives selon une paradoxale visibilité, une véritable énigme de la création.
C’est dans cette nouvelle gravité de la composition, dans l’écart des matières et des répertoires, taillé par la pertinence et l’originalité d’un vocabulaire plastique que se situe l’essence de l’œuvre d’Anne Itzykson.
Canoline Critiks
FRENCH ARTIST GOES FOR BRONZE
"La Source" by Anne Itzykson
The small commune of Le Mée-sur-Seine, south of Paris, is known as a place where the well-heeled like to live. Designer Karl Lagerfeld owned a spacious home there, and members of one royal family are said to have property around the area.
But for art lovers, a trip to Le Mée-sur-Seine is worthwhile for the striking sculpture by French artist Anne Itzykson that graces the roundabout at the junction of several of the commune's main roads.
Titled "La Source", the tall nude woman in bronze forms part of a 3-meter high fountain, and was inaugurated in 2008, after three years of work. It is one of the few public installations that Itzykson has done, and viewing it certainly beats gawking at mere mansions.
Working from her atelier in the 20th district of Paris, Itzykson is among the unusual breed of artists who currently devote themselves to bronze and marble, carrying on the tradition of sculptors such as Auguste Rodin, whom she cites as an inspiration.
When she does group exhibitions, Itzykson's work stands out both for the artistry and the materials she uses. At a recent show at Paris' famed Jardin du Luxembourg, for instance, her sculptures attracted a good deal of attention, offering something different from the customary oils and pastels.
"I love everything about bronze and marble," she told Tasshon in an interview. "I like the feel, and the look, even when the results can be so completely different."
Itzykson focuses mostly on the female form but she also does sculptures of children, individually or in groups. She often employs her son and daughter as the models, while the male figures she has created tend to be portrayals of her husband.
She said that her "passion" for art began when she was 16 years old and saw the poster for an exhibition by Jean-Jacques Pradier - a 19th-century Swiss-born French sculptor who was influenced by classical art.
"The poster showed a close-up of the back of a woman sitting on a velvet cushion, her hair woven in braids," Itzykson recalled. "I remember asking my grandmother to take me to see this show although at the time I was not yet interested in sculpture. The softness, femininity and versatility of this marble cushion really struck me."
As a teenager, Itzykson did not think that art was a career option, so she chose to study marketing, doing a master's in the United States. While there, she took a pottery course and realized that she had a talent for forming human figures.
"What truly inspires me the most is the 'human being' which I observe everywhere and continuously," she told Tasshon. "Its expressions intrigue me, not just the faces, but each part of the body: hands, feet. Everything speaks."
Anne Itzykson in her Paris studio. (© McKenzie)
Sculptures by Itzykson
Itzykson worked in marketing for several years before turning fully to art. It wasn't an easy path because using bronze and marble is quite a labour-intensive process.
For bronze, the first step is to create the figure in clay, then to make a mold, which sometimes needs to be in several parts. Following this, the artist makes a wax replica, completes several other procedures, and finally pours the molten metal.
The final stages include welding separate pieces of the sculpture together, sanding the object, and colouring the bronze. Having access to a foundry is a must, so one can understand why bronze sculptures often carry a high price tag. And Itzykson's works are no exception.
Despite the "technical" aspects of producing such sculptures, the artist said that it's all still an "instinctive" process. "It's as if my hands are detached from my mind and searching in the clay for a language to express an idea, a thought," she explained. "When my pieces are finished, I become the viewer trying to understand and decipher what I meant."
She sometimes adds a different material to the bronze, such as crystal. One of her most recent works, "Youpi!", shows a child with tangled locks sitting on a crystal ball in a pose of joyfulness, arms outstretched. The blend of materials and rich colours are instantly eye-catching, but the process was quite difficult, Itzykson said. And she still has doubts about the finished objects.
"Are my works successful? Who can say? Certainly not me," she told Tasshon. "It is others who will judge."
Any visitor to Mée-sur-Seine who drives around her bronze fountain would be quick to reassure her. - L. McKenzie
From http://tasshon.blogspot.fr/
The limited-edition "Youpi!" series, by Itzykson
L'Artiste
L’artiste n’a pas besoin de biographie !!
L’artiste est elle-même biographe, en tant qu’elle écrit la vie.
Elle « empreinte » dans la matière ce qu’à la vie elle emprunte : dans la texture de son matériau, elle engramme, écrit, enregistre… le texte qu’elle lui prélève.
Elle grave des instants de vie pour les immortaliser : l’artiste jette des étincelles d’éternité dans la matière pour nous les rendre vivantes et actuelles.
L’artiste transmue la nature en culture.
L’artiste est un passeur ! Un passeur qui nous montre ce que nos yeux « civilisés » ne saisissent pas.
L’artiste fait de l’instantané définitif, du « ah ! …» un « à jamais » . Elle est gourmande d’éphémère : un sourire, une attitude, le doux-rond d’une jambe, quelques volutes capillaires… fugaces… qu’elle fixe et les voilà pour toujours re-présentées.
Un « rien » pour nous devient « tout » pour elle.
L’artiste a cette vertu capitale qui manque si cruellement à nos vies d’humains modernes rationnels : la sensibilité… Elle y trempe ses instruments… pour nous révéler le Beau de la vie. Même ceux qui se laissent glisser sur les versants mauvais ne parviennent à les sublimer ; ce qui n’est définitivement pas le fait d’Anne Itzykson.
Anne Itzykson n’échappe pas à ces évidences. Elle en fait sa pâte. « Le style, c’est la femme » !
Anne Itzykson est une femme de style !
Elle revêt (sa) la féminité d’(e) (des) habillages chaque fois différents, où elle (se) révèle avec grâce.
Elle chante plus volontiers la femme, peut-être parce que la femme manifeste plus aisément son humanité…
Laissez-vous surprendre par la délicate présence d’une de ses sculptures : ne la sentez-vous pas d’une force de vie propre ? Et propre à affermir la vôtre ? N’avez-vous pas envie d’être plus audacieux qu’ Hugo pour vous exclamer « objets prétendument inanimés, vous avez donc une âme » ?
C’est qu’il y a de la force en cette femme, de la densité, de la sensibilité, de la sensualité, du goût esthétique… Elle est toute tension vers la perfection !
Souhaitons que jamais elle n’atteigne cette perfection si convoitée… pour qu’elle continue à nous réjouir.
André SOLER